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www.dauphinweb.com

  le dauphin
Eric Demay

Bonjour et bienvenue sur le site le.dauphin.free.fr,

je voudrais vous faire partager mes passions dont les dauphins sont les principaux acteurs de ma vie. Ils sont rentrés comme ça, sans prévenir. Je faisais un tour du Monde pour surfer et apprendre l 'anglais; au final je me suis retrouvé par le pur des hasard à m'investir corps et âme pour la protection des dauphins au "Dolphin Discovery Centre" en Australie. De mon retour en France, je trouve un "petit" job au GECEM (Groupe d'Etude des Cétacés de  Méditerranée): surveiller et étudier un dauphin sauvage 24h/24h! En gros "ton boulot, c 'est vivre avec un dauphin pendant deux années au moins"! Formidable expérience sous le  soleil catalan dans le village de Collioure. Ce dauphin, c'était Dolphy , une femelle "grand dauphin" qui partagea ma vie pendant presque trois années. Ensuite, je réalisais un documentaire vidéo avec le concours de l'acteur-réalisateur Jean-Marc Barr ( Homme et dauphin: mode d 'emploi) reportage qui m'amena de nouveau en Australie et ensuite aux Bahamas (photo ci dessus tournage aux Bahamas sur le bateau "Eagle" de "Island Expedition"-1996 ) . Maintenant, je n'hésite pas à rencontrer mes amis aquatiques un peu partout dans le monde et même prés des côtes françaises. Photo ci contre discussion avec une amie . J'ai nagé avec "quelques centaines "de dauphins en Polynésie, aux Bahamas ou dans  l'Océan Indien, j'ai rencontré le fameux requin- baleine, quelques baleines et cachalots mais je reste un éternel débutant et un bien piètre apnéiste!

 

 

Communiquer avec les dauphins

Chercher la communication, provoquer les contacts c'est avant tout protéger l'animal. Malgré tout, je pense qu 'on ne considere pas le dauphin à sa juste valeur. Il n'est ni un animal de cirque, ni un être venu de je ne sais quelle panète . C 'est un animal sauvage voilà tout... ou presque! Car dans un même temps il n 'est pas non plus un simple objet d 'étude, il est temps de le considérer autrement, il est notre cousin terrestre. C'est pourquoi j'ai toujours pensé qu 'il fallait se mettre au diapason de son interlocuteur,  s'adapter à son milieu et ses éléments. Lorsqu'on voyage il est toujours bon de tenter de parler le langage local, quelques mots peuvent suffire pour gagner toute la confiance de son interlocuteur. Avec les animaux c'est pareil, il ne faut pas hésiter de tremper sa chemise, on pourrait dire tremper sa combinaison néoprene. L'apnée est une des clés à cette communication, une voie pour comprendre le monde des cétacés.( ci contre photos avec Dolphy à Collioure-1992 ).

 

L 'escalade

Pour moi l 'escalade ne se résume pas à la simple image du sport complet. C'est avant tout un monde vie, prés de la nature et des éléments. Avant de connaître les dauphins, l'escalade était ma profession et ma passion premiere. J'ai un brevet d 'état qui m'a permis d'enseigner dans divers endroits de la planéte. J'ai participé à quelques Coupes du Monde, ouvert quelques voies dites extrêmes particulierement dans les gorges du Verdon. J'ai été ouvreur de voies lors de Coupe du Monde ou de Master ce qui m 'a permis de voyager pas mal (Japon, Singapour, Europe...). Le must restera ces petites escalades en solo intégral (sans corde ni artifice et même pieds nus!) réalisées sur les falaises de 300 mètres de la falaise de l 'Escales dans le Verdon (photo ci contre-  gravissant la voie "Wide is Love" 1985 ) ce qui m'a beaucoup apporté dans ma recherche de concentration et me sert sans aucun doute  maintenant avec les dauphins. Désormais je "grimpouille" à mon niveau trés moyen mais je savoure toujours autant!

Photos : http://demay.eric.free.fr

 

 

     Le livre  en vente sur www.dauphinweb.com

ITV 1 "France Delory":

Depuis la nuit des temps, le dauphin cherche à rentrer en contact avec son cousin terrestre, l 'homme.

Fresques de la civilisation crétoise, récits de la grecque antique, légendes indiennes, rêves aborigènes, autant de témoignages qui certifient que l 'homme et le dauphin lient une solide histoire d 'amitié.

Depuis le début des années 70, il existe même un nouveau phénomène, celui du dauphin ambassadeur, ces cétacés au comportement atypique qui choisissent de rencontrer les hommes dans les ports ou prés des plages. Eric Demay part à la rencontre de ces animaux sur toutes les mers du globe, sur les plages de l 'Ouest australien, en Floride ou aux Bahamas et parfois même en France. De 1992 à 1995, il est chargé d 'étude pour le GECEM, le Groupe d 'étude des Cétacés de Méditerranée, pour le suivi du dauphin Dolphy prés de Collioure. Il vit alors 24h/24h en compagnie de cette femelle dauphin et enregistre une mine d 'information. En 2000, il sauve la vie d 'un dauphin "bleu et blanc" en lui retirant un hameçon trident planté au fond de la bouche, une premiere mondiale avec un dauphin de cette espèce.


Comment vient on à consacrer sa vie aux dauphins?

Il s 'agit en fait d 'une rencontre, c 'était sur la plage de Bunbury en Australie occidentale. Ici, les dauphins vivent en réelle harmonie avec les hommes, malgré quelques réticences de la part de certains pêcheurs. J 'ai appris que ces cétacés avaient un pouvoir de communication inouï, des possibilités physique exceptionnelle. Il y avait cette delphine du doux nom de Sarana; elle m 'avait présenté son bébé qui venait de naître, une réelle joie, un moment d' émotion intense. De la part d 'un animal sauvage, son geste était un véritable cadeau, un privilège de la nature. La nuit suivante, le delphineau mourut et la peine de la mère fut considérable. Elle m'apporta son petit croyant sans doute que je pourrais faire quelque chose pour soulager sa douleur. Je la voyais pousser du bout du rostre ce petit dauphin sans vie. L ' équipe du "Dolphin Discovery Centre" qui suit la centaine de dauphins dans la baie de Bunbury me chargea d 'accompagner la delphine et de la soigner. Pour moi, ce fut une véritable révélation. De retour en France, il me fallait continuer, c 'est ainsi que l 'aventure "Dolphy" commença.


Dolphy était un dauphin ambassadeur?

Oui, en fait le nom ambassadeur n 'est pas reconnu par la milieu scientifique. C 'est une sorte d ' "appelation" qui veut que ces dauphins sont des émissaires venus à la rencontre des humains qui les alertent sur les problèmes de pêche ou de pollution. Dans l 'absolue, l 'expression n 'est pas si utopique puisque par exemple avec Dolphy sa présence m 'a permis d ' informer le public sur tous nos problèmes liés à l,'écologie marine, par les biais de conférences ou de publication avec les médias locaux.

Le problème du dauphin dit "ambassadeur" est que sa familiarité avec l 'homme est parfois excessive. Il nous faut alors informer le public sur ce que représente réellement un dauphin, un animal sauvage et non un jouet de cirque seulement bon à sauter dans un cerceau. Avec Dolphy c 'était encore plus délicat car l 'été venue, des milliers de touristes affluaient pour la voir, et la toucher! J 'ai été obligé de monter une équipe de surveillance afin de surveiller la quiétude de son sommeil, une véritable organisation de rangers.


Ce dauphin était en fait une femelle?

Oui, et ce n'était pas simple. Avec un mâle, c 'est très différent. Lui ne se laisse pas faire, dés qu' il y a abus de la part des nageurs il peut mordre ou donner des coups de queue ou de rostre. Il peut se débrouiller presque tout seul. Les femelles sont plus dociles et du coup elles se font moins respectées. Il n ' y a qu 'à voir les animaux de cirque, toutes espèces confondues: les femelles prédominent . Allez dresser un mâle c 'est déjà plus difficile. La seule chose qui m' inquiete parfois est que certains ambassadeurs sont des mâles comme c 'est le cas avec les deux dauphins aperçus récemment sur la côte atlantique française. En Bretagne un des deux dauphins à mordus des baigneurs trop pressants. Ce n 'est pas très grave mais des situations plus extrêmes ont déjà eu lieu notamment au Brésil où un dauphin a tué un baigneur en lui percutant le ventre d 'un coup de rostre.

Quelle serait a meilleure attitude à adopter?

Tout simplement le respect et l 'humilité. Nous avons à faire à des individus à priori intelligent à la structure sociale complexe. De quel droit pouvons nous toucher un tel animal, imposer notre loi? Ce sont des animaux sauvages et rien de plus et il faut les respecter en tant que tel. Il est vrai que les médias ne nous donnent pas toujours la meilleure attitude à suivre. Le dauphin est souvent représenté en tant que clown et dés que une personne est à l 'eau, elle s 'agrippe à l 'aileron dorsal du malheureux animal. Je dis malheureux car le sourire du dauphin n 'est que une illusion, une spécificité de la physionomie de ses mâchoires. N 'oublions pas que les cétacés représentés lors de pub ou de série de fiction comme Flipper sont tous des dauphins dressés issus de la captivité.


Et vous, quel est excatement votre attitude?

Cela dépend du contexte, du lieu mais surtout de l 'animal. Chaque individu a sa propre personnalité et puis cela dépend aussi de l 'espèce. De maniere générale, je ne saute pas à l 'eau tant que je n 'ai pas correctement analyser la situation: le dauphin désire t 'il le contact, chasse t 'il ou dort t 'il ? Toutes ces questions sont à prendre en compte. Une fois dans l 'eau, je ne vais jamais en direction de l 'animal question de stratégie. Si ce dernier désire le contact, il prendra lui même l 'initiative et l 'interaction ne sera que meilleure.


Mais alors à quel moment peut on parler d 'interaction?

L 'interaction peut commencer très tôt, ne serait ce que par le regard. Un coup d' oeil de part et d 'autres c 'est déjà une façon de se dire "bonjour, comment vas tu?". Si le dauphin fait demi tour pour vous regarder de nouveau, c 'est encore une sorte de communication. Si de votre côté vous ne le touchez pas alors qu'il passe très prés de votre main vous lui donnez alors toute votre confiance.

Bien entendu cela peut aller bien plus loin. Si le dauphin prend votre main dans la bouche en la mordillant très délicatement, il vous fait comprendre que vous pouvez avoir confiance. Cette situation m'est arrivé pas mal au début lorsque je n 'étais pas sûr des motivations de l 'animal.

Et puis il y a le mimétisme que ce soit corporel, par la gestuelle ou sonore. Votre façon de nager peut intéressé l 'animal, sur le dos ou la tête à l 'envers contre le fond, bien sûr vaut mieux savoir nager!

Les sons aussi sont très important et il m'est arrivé souvent d 'échanger une conversation faite de cliquetis et ce claquements: je sais faire quelques sons dauphins depuis mon enfance qui amusent beaucoup mes amis aquatiques.

Quel est l 'avenir pour les dauphins ambassadeurs?

Une chose est certaine,  il y aura de plus en plus de dauphins qui chercheront à rentrer en contact avec l 'homme, j 'en suis persuadé. Maintenant, tout n 'est pas rose, l 'homme n 'est pas encore prêt pour vivre en harmonie avec le monde sauvage, mais les mentalités évoluent. Il faudra un jour légiféré car les textes protégeant les cétacés ne sont pas bien adaptés à la situation du dauphin ambassadeur. Dans la Grêce antique, le dauphin était Roi mais depuis les choses ont bien changé. Désormais nous connaissons mieux cet animal sauvage, aurons nous l 'humilité nécessaire pour lui laisser une place prés de nous, je l 'espère.

ED -surveillance de Dolphy à Collioure-1992

ITV 2 "Sandra Guyomar":
 

Dur de se présenter finalement, mais bon en ce qui concerne l'activité qui me lie aux dauphins je suis très à cheval sur notre relation avec les animaux sauvages et en particulier le cétacé. J'ai été pour ainsi dire formé au sein du « Dolphin Trust de Bunbury » en Australie, maintenant remplacé par le « Dolphin Discovery Centre ». J'ai eu cette chance fabuleuse de rencontrer des passionnés qui respectent réellement le dauphin. J'ai toujours voulu développer cette éthique en France même si les débuts furent très difficiles car le Français est du genre plutôt râleur à tendance jalouse ! Je crois qu'avec et grâce à Dolphy de Collioure les idées reçues sur le dauphin sauvage ont bien évolué en France (je pense en fait à la question du « dauphin-jouet » que tout le monde veut toucher coûte que coûte). Pour le reste je m'efforce d'ouvrer pour la protection des delphinidés en général auprès du grand public. Par exemple un documentaire de 52 minutes sera diffusé sur « Télé Cannes » cet été  concernant la relation entre l'homme et le dauphin. J'ai entièrement produit et réalisé ce reportage avec l'idée d'aider la cause des cétacés. La caméra sous-marine est en fait un des accessoires qui me lie maintenant aux dauphins. Je pense que le dauphin ambassadeur est un élément essentiel pour la protection des cétacés, de la mer et de notre relation avec le monde naturel. Et il faut être très prudent avec l'utilisation médiatique qui en est faite, alors je veille au grain ! Par exemple, pour les dauphins des Embiez  en 2000, il s'en est fallut de peu pour que ce soit vraiment le cirque. Maintenant, il m'arrive toutefois de rencontrer des dauphins en Méditerranée avec le simple plaisir de les voir évoluer. Cet hiver se sera l'Afrique pour quelques photos de Tursiops aduncus et si, à mon retour, je peux témoigner avec quelques belles images de la fragilité des océans et bien c'est tant mieux.

-Pourriez-vous nous livrer un ou plusieurs témoignages de vos rencontres avec un dauphin ambassadeur/solitaire ?


NB : Eric Demay a vécu, il y a quelques années, une rencontre très forte en émotion avec une dauphine, surnommée Pointe Noire. Elle ne peut pas être considérée à proprement parler comme une ambassadrice/solitaire, mais une partie de son vécu doit être rapproché du sujet qui nous intéresse, puisqu'il semblerait que Pointe Noire se soit rapprochée de l'homme car elle avait besoin d'aide.


Ce témoignage est l'occasion de revenir sur l'histoire des dauphins des Embiez :


« Début octobre 2000, sept dauphins 'Bleu et Blanc' rentrent dans le port de l'île des Embiez (Var). Deux delphines y restent. L'une d'elles meure et l'autre est retrouvée avec un hameçon planté dans la gencive. Après 40 minutes de communication, elle pose volontairement sa tête entre les mains d'Eric Demay qui finit par la soulager en lui extrayant l'hameçon. L'expérience vécue par ce spécialiste des dauphins sauvages est une première mondiale ! »

Le Dauphin Bleu et Blanc vit en groupe. Sa durée de vie est d'une quarantaine d'années. Il s'agit d'une espèce ludique qui se tient à distance de l'homme.

« Mercredi 10 octobre 2000 :


J'aimerais que la delphine, 'Pointe Noire', quitte le port le plus tôt possible. Elle est encore là, solitaire, maigre et affaiblie. Elle garde la bouche ouverte à cause d'un hameçon trident planté dans la mâchoire. Elle s'est certainement jetée sur un des appâts attachés par un fil à un quai du port. Et dire que c'est une technique de pêche interdite ! Blessée, la delphine ne peut plus ni chasser, ni avaler de poisson.


Ce matin, une équipe de télévision a prévu de réaliser un sujet sur cette delphine restée seule dans le port des Embiez. Les journalistes vont être servis. Il est trop tard pour annuler leur reportage. Et, je dois me concentrer sur le cas de 'Pointe Noire' à qui j'ai vraiment envie de dire 'Tu sais, j'en ai connu des dauphins 'galère', mais toi, tu es vraiment incroyable ! Pars loin de nous, tu n'as rien de bon à espérer en restant. Tu as voulu attraper un poisson dans le port et voilà le résultat'.


Patrick Lelong et Yvan Martin, qui travaillent tous deux à l'Institut Océanographique Paul Ricard, sont présents. Ils peuvent s'occuper des journalistes à ma place. Daniel Rebillard, un plongeur confirmé est là aussi. Tous se demandent ce que je compte faire. Ma réponse est sans appel : enlever l'hameçon sans utiliser d'outils mais avec la collaboration du dauphin. Facile à dire ! Les scientifiques n'y croient pas ; pour eux la seule solution est de capturer la delphine et de lui extraire l'hameçon avec des pinces. Mais un dauphin sauvage ne se laisse jamais faire, alors un Stenella n'en parlons pas.


Pour être le plus près possible de l'eau, je descends sur une annexe. 'Pointe Noire' arrive immédiatement et pose sa tête entre mes mains. Un fil long de plus d'un mètre pend du rostre. A ce moment précis, je peux agir mais je ne me sens pas prêt. Si ma tentative échoue, deux ou trois jours seront nécessaires avant que la delphine reprenne confiance et revienne vers moi. Je file chercher ma combinaison et quelques sardines pour la nourrir.


Assis sur le rebord de l'annexe, les pieds dans l'eau, je commence à siffloter doucement. J'enlève mes chaussons de néoprène afin que 'Pointe Noire' sente la proximité de ma peau, astuce que j'utilise depuis longtemps avec les dauphins 'à problème' et qui m'a toujours porté chance ! Les sardines sont trop grosses, mais je veux absolument alimenter la delphine affamée.


Je les coupe donc en deux ou trois afin de les lui glisser par le côté de la bouche. L'hameçon empêche toute absorption de face comme le font normalement les dauphins. Elle avale les morceaux dans n'importe quel sens. Habituellement, une fois attrapé, le poisson est tourné la tête la première en direction de l'osophage ; la forme fuselée du poisson facilite le passage vers l'estomac. Je lui donne les morceaux dans le bon sens, en plaçant mes doigts entre ses dents. L'hameçon lui fait mal et empêche tout mouvement de mâchoires. Ce gavage pathétique s'éternise.


De temps en temps, elle se laisse toucher ce qui me permet d'évaluer précisément la situation : l'ardillon (le dard en quelque sorte) de l'hameçon est bien enfoncé. En cas d'extraction, la douleur sera très vive. En opérant avec des pinces, j'arracherai forcément une partie de la gencive. Je tente de lui offrir une sardine entière qu'elle avale très difficilement. Je cherche ainsi à lui expliquer que je ne lui en couperai pas de petits morceaux éternellement. Le seul dénouement possible est de la débarrasser de cet hameçon. Daniel me passe une paire de pinces, dont je montre le fonctionnement à la delphine, tout en la nourrissant. Elle s'en approche sans crainte. Je peux alors la saisir et arracher l'hameçon de force, mais cette option ne me convainc pas : je risque de lui faire mal et elle ne se laissera plus approcher. D'ailleurs je la sens hésitante.


A chaque fois qu'elle se rapproche, je garde mes mains grandes ouvertes près de ses yeux, partie la plus fragile du corps. Je reste extrêmement serein et déterminé, mes mains ne tremblent pas. Ma concentration est intense, comme lorsque je pratiquais l'escalade en solitaire. Nous savons, la delphine et moi, que nous allons réussir. Je n'entends plus rien. En revanche, mes autres sens sont en éveil : je la vois, je la sens, ou plutôt je la ressens. le mot exact me manque.


Je laisse glisser sans le retenir le fil de crin ; la delphine a un peu peur. Je la rassure en lui parlant : j'agirai quand elle le décidera. On communique par 'évent interposé' ! Pour ma part, c'est ma bouche qui tente d'imiter les cliquetis du dauphin. Je lui montre un gant que je passe à ma main gauche. Je fais le choix de garder ma main droite nue. Ainsi mes deux mains sont vraiment complémentaires : l'une est protége, l'autre, non couverte, est plus précise. De plus, la main sans défense est une preuve de confiance envers la delphine. Nous n'aurons peut-être qu'une seule occasion. La delphine passe une fois devant le gant.


Elle a compris, fait demi-tour et pose son rostre dans ma main gauche. Je maintiens sa tête hors de l'eau. Je la caresse sur son oil droit : la confiance est totale. J'essaye de découvrir rapidement le sens et la direction à donner à l'hameçon afin d'en sortir l'ardillon en arrachant le moins de gencive possible. 'Pointe Noire' tourne légèrement la tête pour m'indiquer la meilleure technique. L'opération, qui dure une dizaine de secondes, n'est pas facile. Contrairement aux 'Tursiops', l'amplitude d'ouverture des mâchoires des 'Bleu et Blanc' est très faible. Ma main gauche est coincée entre les dents pointues de la delphine qui ne manifeste aucune résistance. Je réussis enfin à sortir l'hameçon de la main droite. L'aileron dorsal de 'Pointe Noire' tremble, elle a eu la trouille de sa vie. Elle est certainement la première delphine 'Bleu et Blanc', espèce particulièrement sauvage, à s'être autant approchée de l'homme.


Je répète sans cesse à Patrick Lelong : 'Incroyable, elle s'est laissée faire, un 'Bleu et Blanc', ce n'est pas possible'.

Pour la remercier de son courage et de sa confiance, je vais à l'eau et lui donne les dernières sardines. Pour l'équipe de télévision, c'est du gâteau. Incrédule, Daniel, qui avait ma caméra a tout filmé. La delphine partie, je réponds aux interviews dans un état psychique étrange. Je me réjouis que les journalistes partent : après quarante minutes de concentration, je craque. J'étais sûr de mon coup (ou plutôt de notre coup) et pourtant j'ai dû contenir toutes mes émotions. Nous avions deux possibilités : les pinces ou mes mains. Le dauphin et moi-même avons choisi la méthode douce.


Ce qui s'est passé me conforte dans l'idée que si l'homme sait être à l'écoute, ce genre de confiance inter-espèces peut se renouveler. Il ne tient qu'à l'espèce humaine d'en décider ».


Texte original et photos à voir sur "L 'homme qui parlait aux dauphins".

Pointe noire aux Embiez-2000-

-Que vous a (ont) apportée(s) cette (ces) rencontre(s) ?


En fait toutes les rencontres sont différentes car elles sont toujours dans des
contextes différents : en pleine mer, dans un port, avec une caméra sous-marine
ou « en totale liberté » de mouvement.
Il y a des rencontres lors desquelles le dauphin peut être en détresse (coincé dans un port ou entouré de haut fond ou pour un problème physique...) et, dans ce cas là, on essaye tout simplement d'apporter son aide et lorsque cela marche, on éprouve bien entendu un sentiment de joie, une impression d'avoir fait quelque chose d'extraordinaire. Bien sûr, la première rencontre est bien différente des autres suivantes. Finalement on se dit qu'on a pas mal de chance en sortant de l'eau surtout quand on pense que la journée aurait pu se passer au boulot à l'usine, dans un bureau ou dans un lit d'hôpital. Pour moi ce type de rencontre me conforte dans le style de vie que j'ai choisi, voilà tout, mais ce genre de sensation peut aussi bien se
produire avec la rencontre d'un autre animal « un peu » mystique comme le
Dugong ou le Requin Baleine par exemple.

-Avez-vous une ou plusieurs anecdotes à nous livrer ?

Il y en a presque trop ! Difficile de les raconter sur papier tant l'ambiance
générale est importante. Les histoires que je me plais à raconter lors des
conférences sont les relations extraordinaires entre les chiens et les
dauphins. La plupart du temps, les dauphins préfèrent la compagnie des
compagnons canins plutôt que celles des hommes, ce qui fruste pas mal de
baigneurs en mal de « Grand Bleu ». C'est une situation un peu cruelle certes,
mais c'est la « loi du marché ». La plupart des hommes  n'apportent pas grand
chose au cétacé, la plupart sont des piètres nageurs qui ne pensent qu'à
toucher l'animal et voilà tout. Cela remet en question pas mal d'idées reçues
sur le dauphin.

-Avez-vous tissé des liens particuliers avec l'un de ces dauphins, la nature de votre relation évoluait-elle au fur et à mesure des rencontres ?

De toute façon, le cétacé est un animal doué de raison, comme le dit le livre,
donc bien entendu les relations évoluent comme ce serait le cas avec un être
humain et avec certaines variantes. En fonction de l'individu les relations évoluent différemment et ce suivant l'espèce, le sexe ou l'âge de l'animal, mais
c'est aussi le cas avec beaucoup de mammifères. J'ai bien sur tissé des liens
importants mais j'essaye toujours de les casser afin que personne ne
devienne dépendant. Lorsque je travaillais en delphinarium, cela n'était pas
très important mais un dauphin dit « ambassadeur » n'a rien de bon à rester en
compagnie des hommes et il doit retourner impérativement avec les siens. Ma
première expérience la plus marquante est qu'un dauphin femelle sauvage m'ait
présenté son delphineau juste après l'accouchement et c'est la «tante»* qui
est venue me chercher. Ensuite le petit est mort car né trop tôt et la
situation a été très particulière, il y avait réellement une relation d'amitié
entre ces deux delphines et moi-même.

* Une « tante » est une dauphine qui assiste la future maman lors de son accouchement.

-Quelle(s) hypothèse(s) vous semble la (les) plus plausible(s) quant à l'intérêt que porte le dauphin à l'homme : individu dominé rejeté de son groupe, ancien pensionnaire de l'armée ou d'un delphinarium qui tente de « renouer » avec son ancien maître, co-évolution ou autre ?

Et bien la réponse est égale à la question !!! Tous les cas sont différents,
vous avez oubliez que certains cétacés se perdent près des côtes à cause de la
structure particulière des hauts fonds ou pour d'autres raisons. Cependant je
me demande parfois si certains dauphins ne considèrent pas l'homme comme une
sorte de Dieu, un guérisseur. C'est l'hypothèse que nous avons soulevée avec
l'institut Paul Ricard pour l'histoire des dauphins des Embiez. C'est une idée que je défends souvent mais comme je le disais, il y a de tout. En fait les dauphins fonctionnent comme les hommes et il peut arriver que certains individus choisissent de vivre avec des êtres d'une autre espèce comme j'ai pu le faire moi-même lorsque j'étais en Australie. Anthropomorphisme oui, mais pourquoi pas ?

-Faut-il laisser les hommes approcher les dauphins ambassadeurs/solitaires et laisser les interactions se dérouler, ou, au contraire, les « cacher » pour les protéger ?

Au début je croyais qu'il était bon de mettre en relation les animaux et les
hommes et j'y croyais encore lors de ma première année avec le dauphin
Dolphy. Mais il est certain que c'est (hélas) une erreur car l'homme n'est
pas du tout raisonnable. A Collioure, il a m'a fallut monter une équipe de
nuit afin de surveiller le sommeil de Dolphy car c'était vraiment le cirque.
Nous avons pu constater que l'harmonie entre l'homme et la faune sauvage,
est à des années lumières. Cela est possible dans certaines régions
comme j'ai pu le voir en Australie ou en Polynésie car les mentalités sont
bien différentes. Mais alors en France c'est vraiment trop le cirque, faut
dire que le Français est particulièrement pénible pour ce genre de choses. En
bref, y'a du boulot !

Je connais depuis quelques années un dauphin solitaire en Europe (répertorié nulle part) et je préfère ne pas en parler car sa position ressemble beaucoup à celle de Dolphy (station balnéaire, pêcheurs locaux difficiles, accès dans l'eau facile, scientifique sans scrupule basé non loin). Comme je ne peux pas être réellement présent et assumer mes actes (car si on médiatise il faut sacrément bosser derrière) je préfère garder le silence. Il ne faut pas oublier qu'il existe deux types de dauphins ambassadeurs le type « Dolphy » (compliqué !) et le type « Fanny » (pas de réelle protection nécessaire vu l'environnement !). Dolphy c'était extrême et j'espère que cette situation ne se reproduira plus, quant aux autres à venir essayons de leur donner une bonne image de nous mêmes.